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Hommage à Rachid Taha - Hassina Mechaï : "Il revient à ma mémoire"

 « Il revient à ma mémoire » un souvenir. Celui de ce garçon qui est apparu, chemise blanche, cheveux noirs, silhouette fine comme dessinée à l'encre, pour chanter « Douce France ». Il ressemblait à la fois à Joe Strummer, le mythique chanteur des Clash, et à Al Pacino, celui d'Un après-midi de chien. Ce garçon était fils d'immigré algérien et ce qu'il chantait n'était pas « Rock the Casbah » (cela, ce sera plus tard), ni du chaâbi, ni de l'arabo-andalou, ni de la chanson kabyle, du chaoui ou du raï. Ce garçon si « ostensiblement » maghrébin, au visage affuté et à la boucle d'oreille apparente, chantait la « Douce France ». Faut-il écrire « dulce France » tant Rachid Taha avait su redire ces mots d'antan, comme les avait peut-être dits le chevalier de Roncevaux dans La Chanson de Roland : en semblant tout à la fois expirer et renaître.

 

 

« Il revient à ma mémoire » que cet homme issu de l'immigration algérienne chantait le « cher pays de [son] enfance ». Il chantait, ce garçon qui a grandi entre l'Alsace, les Vosges et Lyon, « [son] village au clocher aux maisons sages ». Il célébrait celui qui fut déraciné de son Oranie natale à l'âge de 9 ans pour la grande route de l'exil, la « tendre insouciance » de l'enfance. Il disait « oui je t'aime », malgré tout et malgré tous, à un pays où l'immigration, après avoir longtemps été une solution au manque de main-d'œuvre, de bras pour reconstruire la Douce France, devenait soudain un problème.

« Il revient à ma mémoire » que cette reprise d'un fleuron de la chanson française avait fait l'effet d'une révélation lumineuse pour certains, d'une apocalypse scandaleuse pour d'autres. Et il le faisait au sein d'un groupe baptisé « Carte de séjour », formidable pirouette et pied de nez à cette fameuse « carte » qui suspendait tous les 10 ans la vie de son détenteur à une autorisation administrative de séjour. Il le faisait dans un clip d'anthologie, couleurs sépia, dans lequel il apparaissait, image d'Épinal, en casquette de gavroche, bretelles et chemise blanche. Il y jouait à la pétanque, il y séduisait la belle du village, il buvait un verre avec le curé du village. Il était là où il devait être. Rachid Taha avait eu, dans le même geste, cette grâce pour certains et cet affront suprême pour d'autres, de dire que ces enfants issus de l'immigration étaient légitimes. Au sens premier, justifiés. Il avait fait entendre une voix, la sienne, gutturale, précise, mélodieuse, et il avait ouvert une voie.

« Il revient à ma mémoire » que Rachid Taha avait montré que l'art est rhizome, l'art est fusion. Que tout était possible. Qu'il n'existait pas d'art sans influences et mélanges. Sans extérieur et sans Autre. Qu'il emprunte au répertoire punk, électro, raï, chaâbi, Maalouf. Qu'il reprenne le somptueux Ya rayah (Ô Emigrant) de Dahman El Harrachi et fasse danser le monde sur des paroles qui parlaient de l'exil. Qu'il s'associe un temps sur scène avec Khaled et Faudel pour des reprises mémorables de raï, le joyeux « Abdel Kader », le lyrique « Wahran », le sarcastique « Voilà, Voilà ». Qu'il s'amuse même à reprendre The King himself, avec « It's now or never ». Elvis Presley dont il était fan et qu'il s'amusait parfois à imiter, sur scène, déhanchés souples et syncopés.

« Il revient à ma mémoire » que Rachid Taha aimait la langue arabe. Qu'il savait la manier, la faire rouler sous la langue, la dire amoureusement. Il avait même enregistré un petit bijou avec son grand ami et comparse Rodolphe Burger, avec qui il avait formé le groupe Couscous Clan. « L'arabécédaire », petit bijou de chanson. Sur le modèle de l'Abécédaire du philosophe Gilles Deleuze, Rachid Taha vocalisait avec superbe les lettres de l'alphabet arabe.

 

Rachid Taha disait de lui qu'il était un peu « receleur », à jouer ainsi de tant d'influences. Le receleur vit du vol. Rachid Taha empruntait puis restituait ses emprunts qui avaient gagné alors, entre ses mains, une valeur supérieure. Le receleur privilégie l'or. Rachid Taha savait voir, dans d'apparentes breloques et verroteries artistiques, la valeur absolue. C'est lui qui sut remettre au goût du jour les scopitones désuets de son enfance, notamment à travers le beau « Écoute-moi camarade ». Rachid Taha était transversal, oblique, c'est cela qui faisait que sa musique avait pu être appréciée par Brian Eno, Santana (qui a repris « Kelma »), Robert Plant, autres « receleurs » de génie. Sex Pistols et Oum Kheltoum, raï et punk, chaâbi et électro, rythmes gnawa, oui, des souvenirs par milliers.

« Il revient à ma mémoire » que Rachid Taha semblait toujours avoir deux faces artistiques : l'une lumineuse, simple, abordable, optimiste. L'autre plus sombre, plus compliquée, mélancolique, surtout. S'il participe à lancerla Marche pour l'égalité et contre le racisme de 1983, il avertira aussi que « voilà, voilà, qu'ça recommence. Partout, partout, ils avancent. La leçon n'a pas suffi. Faut dire qu'à la mémoire on a choisi l'oubli ». En 1998, il connaît la liesse du raï avec 1, 2, 3 soleils, le collectif qui le réunit sur scène avec Khaled et Faudel. Mais cette même année, il sortira le si bel album solo Diwân, hommage appuyé aux grands maîtres du chaâbi. Ce mot arabe Diwân, à la fois « assemblée » et « recueil de poèmes », aurait donné les mots français de « divan » et de « douane ». Le savait-il en choisissant ce nom pour un album hommage à la musique maghrébine en France, celle des bleus de travail, des usines, puis des soirées mélancoliques à chanter l'exil, l'immigration, l'espoir.

La jeune génération ne s'y était pas trompée. De Gaëtan Roussel qui lui propose le beau « Bonjour » au chanteur des Têtes Raides, Christian Olivier, avec lequel il chantera « Tekitoi » ? chanson tirée de l'album éponyme, ces musiciens pointus voulaient travailler avec le maître de l'hybride, de la fusion, du mélange. Il ne tissait pas des liens entre Orient et Occident, comme cela est souvent dit. Il était au-delà. Excentré.

On dit que les artistes ne meurent pas vraiment. Rachid Taha venait de terminer un nouvel album qui devait sortir début 2019 sur le label Believe.
Il revient à ma mémoire

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