Nous avons 87 invités et aucun membre en ligne

Majid Blal

FaceBookTwitterGoogle+Instagram

 Tachaouite ! On ferme l’école et on ouvre la misère

Par Majid Blal

 cole cadenasse

 

Bien que déjà délabrée et combien négligée, ils viennent de fermer l’école de Tachaouite !
Il n y aura plus ce brouhaha des enfants qui sortent de l’école, en criant, en riant, les cartables collés sur le dos et les chaussures usées et sans lacets vissées aux pieds.

Il n’y aura plus ce flot de petites frimousses qui côtoient et rasent murs des maisons comme une douce tornade qui, régulièrement et ponctuellement, s’insurge dans les mémoires des vieux pour leur rappeler qu’ils sont toujours entourés par la vie, par l’espoir d’une jeunesse et par le rappel à l’ordre des vivants
Bien que symbole de l’énorme contribution de ce minuscule hameau au devenir de la nation et de l’image de la région, ils ont osé fermer l’école de Tachaouite.

Il n y aura plus ce marqueur identitaire qui, depuis l’indépendance, a développé dans ce Ksar de quelques centaines de familles, la conscience qui en a fait une communauté de savoir d’abord. En priorité et comme le cris d’un seul homme, les habitants s’étaient donné le mot d’ordre de la valorisation de la scolarisation, de l’instruction et de la formation de la seule ressource disponible et seule matière première porteuse d’avenir : ses enfants.
Ils ont osé fermer l’école de Tachaouite. Qui s’indigne ?

Que restera-t-il comme souvenir de l’effort que chaque famille avait supporté pour envoyer leurs enfants garçons comme filles à l’école ?

Déjà qu’on avait suicidé la culture vivrière, sur les rives de l’oued Oudad, maigre ressource qui a été le bailleur de fonds permettant aux parents d’alléger le fardeau des frais scolaire tout au long du parcours de l’apprentissage. On avait consenti tacitement à ne pas mettre fin aux humeurs massacrantes des crues et des inondations des champs par la colère de la montagne El Ayachi et voilà qu’on suicide l’école, ce champs où les neurones des jeunes se développent comme les épis de maïs sur les berges Tassamerte et Aguemmadine.

Ils ont Fermé l’école de Tachaouite !

Ils ignorent, certainement, comment rendre hommage à tous ces anciens, ces illettrés analphabètes qui ont à force de bras, creusé aux marteaux piqueurs le plomb des mines ; à force des doigts couverts de cornes ont retourné la terre pour y semer l’espoir et à la sueur des fronts nourris au petit lait, avaient fait le pari de l’instruction pour donner à Midelt un de ses fleurons en matière grise.

Au prorata des familles et par tête d’habitant, une aussi petite concentration de foyers s’était targuée de rivaliser pour qui mieux-mieux donnerait le plus de diplômés, de cadres, de médecins, d’ingénieurs, d’officiers, d’enseignants…Tachaouite est d’abord une école en elle-même. Un exemple de société de savoir comme l’avait appliquée la Corée du Sud qui sans matières premières a misé sur le développement du potentiel humain et sur la valorisation de sa jeunesse par le savoir…

Ihraï, Derkaoui, Bachtou, Ghanem, Aït-Ichou, Zinbi, Khedji, Faouzi, Faska, Hssassa, Bouteghlaline, Blal, Barrou, Beddouz et nombre d’autres familles qui ont privilégié l’école malgré les moyens très limitées et la précarité des conditions de vie. À elle seule, une des branches de la famille Ihraï a donné un Super Caid et Secrétaire Gl de Gouverneur, Un Recteur d'Université, Un Directeur des Impôts, Un Professeur Médecin Stomatologue, Un Médecin, un Ingénieur, une Enseignante et une infirmière...Que dire de ce contingent d’officiers, de sous officiers et de soldats se sont donné corps et âme pour l’intégrité d’un pays qui parfois laisse fermer des écoles…

Ils ont fermé l’école déjà négligée en lambeaux et mal entretenue parce que non comprise… Et ils ont lu Al fatiha à moins que cela ne soit la prière des morts.

Quelle société peut être fière de fermer les écoles quand on sait pertinemment que c’est l’unique vecteur vers la dignité quand on possède que la beauté rugueuse et rigoureuse de la montagne qu’on embrasse des yeux chaque matin. Ce Jbel El Ayachi qui a toujours rappelé les siens à l’ordre : Haut s’adapter aux conditions, aux siècles et aux époques…

Ils ne savent pas qu’on ne peut sortir d’une société collectiviste en reniant les liens établis sans y laisser son âme. On ne ferme pas les écoles impunément à moins que l’obscurantisme ne prenne le relais de la lumière recherchée.

Nous n'avions que ces modèles de réussite issus de l'école pour forcer l'espoir, affronter l'adversité et faire de nous des citoyens, des humains self made man.

Tachaouite! Ne devrait pas être désapprise et confinée à la misère intellectuelle comme une orpheline par sa marâtre, uniquement parce que ses enfants sont à bêcher ailleurs pour se réaliser.

J'espère que leur argument n'essaie pas de nous convaincre que faute de rentabilité et de rendement, ils vont délocaliser les écoles en Asie. En chine...

Sherbrooke, le 3 Mars 2012

 Le respect de votre vie privée est notre priorité

Sur midelt.fr, nous utilisons des cookies et des données non sensibles pour gérer notre site.
A quoi nous servent ces cookies ?
Ils nous permettent de mesurer notre audience, de vous proposer des contenus éditoriaux et services plus adaptés et vous permettent de partager nos articles sur vos réseaux sociaux comme Facebook.
Cliquez sur le bouton pour valider votre consentement sachant que vous pouvez modifier vos préférences à tout moment sur notre site.